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29/06/2005

Ultima ratio

« Je ne dis pas désir humain car, en fin de compte, l’homme qui joue avec le dé est captif du désir ainsi mis en jeu. Il ne sait pas l’origine de son désir, roulant avec le symbole écrit sur les six faces. » (Lacan, Le Séminaire, Livre II)

« L’idée même de réel comporte l’exclusion de tout sens. Ça n’est que pour autant que le réel est vidé de tout sens que nous pouvons un peu l’appréhender. » (Lacan, Le Séminaire, séance du 8 mars 1977)



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Le puissance du désir augmente ou diminue selon les intensités elles-mêmes mais chaque intensité est douée d’une sorte de « couleur », c'est-à-dire d'une densité, nuance ou tessiture spécifique qui l’individualise. En effet l'augmentation et la diminution ne s'y disent que relativement. Il semble donc bien que l’intensité n’ait pas de quantité absolue même s'il en va tout autrement du sens des affects.

C'est ainsi qu'une seule et même entité ou instance, le Soi, prend « conscience » de « son » contenu par l’intermédiaire de la réflection entre les individus. L’obstacle, qui est de taille, est qu'on en trouve qui se prennent pour des Moi. Or le Moi est une fausse unité, une fausse cohérence qui, pour subsister en tant qu’illusion, doit hypothéquer l’avenir sous la forme d’une croissance quasi cancéreuse en détruisant, c'est-à-dire en consommant, les possibles. C’est en effet sa contradiction interne qui le pousse à soumettre pour pouvoir projeter sa contradiction, faire d’autrui l’appendice imaginaire et souffrant de son Moi fictif. Mais pour faire un Moi, il faut au moins deux corps. Même la dialectique du Maître et de l’Esclave, cette caricature servile, nécessite deux êtres humains car elle porte sur des désirs et des consciences. Pas celle du Moi. En effet, il ne s'agit là que d'un rapport entre un objet et son possesseur. Ceci est patent, par exemple, dans le fétichisme. Rappelons la thèse de Federer, reprise par Bergler (la névrose de base) : l’esclave s’est voué au maître pour échapper à la panique à laquelle l’exposait sa liberté. Mais aussi bien ce maître n’est en fait que son instrument. Ellipse.

Par conséquent, et ce n'est pas du solipsisme, il y a un Soi, diversement modifié en esprits et corps qui sont des images, c'est-à-dire figures de l'imaginaire. Le Soi est pourtant traversé par la dimension symbolique du langage c'est-à-dire perçu comme un Autre qui affecte le Moi. Néanmoins le Soi est un et « irréflexible ». On ne peut le « voir » puisqu'il n'est pas un Moi, une image, mais au contraire là d'où l'on voit. Ainsi peut-on légitimement demander : le nihiliste n’est-il pas l'esclave sans maître ? Comment, sans cela et par exemple, un paranoïaque du tonneau de Rousseau pourrait-il concevoir les hommes libres par excellence, les Clisthène et Solon, comme des demi-dieux ?

Les nihilistes, et les cyniques le sont, prêchent, en silence ou non et entre autres, ceci : ne rien attendre. Mais c’est attendre rien. En fait, le nihiliste attend toujours quelque chose mais c’est le rien qu'il désire. Même averti par Blanchot que l'apocalypse déçoit, il attend, et c'est tout. Il ne se veut pas vivant, car c'est risquer, certes de jouir, mais surtout de souffrir : c'est mort qu'il se veut.

Oui, le nihilisme est la pierre de touche. Son sectateur est en deçà de l'intuition de la distinction entre joie et tristesse, entre augmentation et diminution de la puissance désirante. « Quel sens ? Quel sens ? » psalmodie ce drôle de paroissien, sorte d'Héraclite plébéien et relativiste, pour qui montée et descente sont un faux plat. Donc, là « où l’on se sent tout le système nerveux éclairé comme un photophore » (Artaud) est pour le nihiliste un lieu inconnu, ou peut-être oublié, c'est-à-dire, au moins, perdu. Il est vrai, comme le dit Gabriel Marcel, que ce type de philosophie, qui, fondamentalement, oppose à l’être une fin de non-recevoir, est cohérente, rationnelle, « philosophique » en somme. Sartre concède de même que l'esprit peut se nier et possède d'ailleurs la puissance infinie de le faire. Et déjà, le cavalier Descartes, ce Pascal d'avant la Chute, désignait la raison de cette étrange manie dans la disproportion entre entendement fini et volonté infinie. Dont acte.

Concluons. On a toujours pensé que la philosophie était en quelque sorte déformée par l’expérience, soit pour s’en réjouir (Nietzsche) soit pour s’en attrister (esprits « scientifiques »). Mais la science de ces déformations inéluctables, de ces lacs et entrelacs moïques, qui est évidemment une optique, une formation même, reste à faire. Disséminés dans la littérature universelle, quelques portulans tactiques et stratégiques, déconnectés et principalement offensifs, attendent un esperanto. Mais cette topologie adéquate à l'exhibition de ces tores paradoxaux, en effet, n'est pas encore construite. S'impose ici un dilemme éthique : ce qui est vu (se présente) par la simple inspection de l'esprit doit-il être théorisé (représenté) ou alors agi pragmatiquement ? Pour le reste, qui n'est pas qu'objet petit a, la joie est l'ultima ratio, même si, parodiant Laclos, conquérir devient notre destin.

28/06/2005

Cigare ?

« Donnez moi un cigare ! » (Lacan à Gloria Gonzalès, séminaire du 23 avril 1974)

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« Au vain projet philosophique de la réciprocité des consciences, la psychanalyse lacanienne substitue pragmatiquement la reconnaissance de l’ordure par l’ordure. » (F. Georges, L’effet ‘Yau-de-poêle)

27/06/2005

Ô lumière, lumière des étés verts

« Je n'ai jamais compris les paroles des hommes, c'est parmi les dieux que j'ai grandi. »

(Hölderlin)

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« Appelant toute chose, je récitai qu'elle était grande, appelant toute bête, qu'elle était belle et bonne.
[...]
insectes verts ! Les bouquets au jardin sentaient le cimetière de famille.
[...]
Sinon l'enfance, qu'y avait-il alors qu'il n'y a plus ? »

(Saint-John Perse)

Semper amicis hora

« Si vis amari, ama. » (Sénèque)

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« Ces nymphes, je les veux perpétuer.
[...]
Je t'adore, courroux des vierges, ô délice
Farouche du sacré fardeau nu qui se glisse
Pour fuir ma lèvre en feu buvant, comme un éclair
Tressaille! la frayeur secrète de la chair:
Des pieds de l'inhumaine au coeur de la timide
Qui délaisse à la fois une innocence, humide
De larmes folles ou de moins tristes vapeurs.
[...]
Tu sais, ma passion, que, pourpre et déjà mûre,
Chaque grenade éclate et d'abeilles murmure;
Et notre sang, épris de qui le va saisir,
Coule pour tout l'essaim éternel du désir.
À l'heure où ce bois d'or et de cendres se teinte
Une fête s'exalte en la feuillée éteinte:
Etna! c'est parmi toi visité de Vénus
Sur ta lave posant tes talons ingénus,
Quand tonne une somme triste ou s'épuise la flamme.
Je tiens la reine! »

(Mallarmé, L'Après-midi d'un Faune)

26/06/2005

Hercule sans emploi

Villiers de L’Isle-Adam, à propos du comte Maximilien de W... : « Abandonné par sa maîtresse qui le croit dépourvu de sensibilité, il ne semble aucunement affecté, écrit quelques vers, se lime les ongles puis, très posément, se suicide. »

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« Il n'est guère de résidu dans cette économie dont la concaténation ne crée que pour des besoins inscrits dans le dessin d'une spirale, spirale car ce sont ici des circularités qui ne clôturent pas - religieusement -, mais renforcent la dynamique de l'écriture en la relançant et en l'orientant. Besoin de créer et besoins créés, mais qui se compensent par système. La ponction est alors une captation qui reconstruit encore de nouveaux réseaux d'échange selon une mathématique irréfragable. Constitution qui est sans cesse la mise en cause du texte archétypique. Souveraineté obstinée, tragique. Précision. Terrorisme dandy. » (Salvy)

25/06/2005

Nomadisme

« Alors que le migrant quitte un milieu devenu amorphe ou ingrat, le nomade est celui qui ne part pas, ne veut pas partir, s’accroche à cet espace lisse où la forêt recule, où la steppe ou le désert croissent, et invente le nomadisme comme réponse à ce défi. Bien sûr, le nomade bouge, mais il est assis, il n’est jamais assis que quand il bouge (le Bédouin au galop, à genoux sur la selle, assis sur la plante de ses pieds retournés, "prouesse d’équilibre"). Le nomade sait attendre, et a une patience infinie. » (Deleuze)

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« Les Fremen avaient au degré suprême cette qualité que les anciens appelaient le "spannungsbogen" et qui est délai que l'on s'impose à soi-même entre le désir que l'on éprouve pour une chose et le geste que l'on fait pour se l'approprier. (Extrait de La Sagesse de Muad'Dib, par la Princesse Irulan)
[...]
Les mains bougent, les lèvres bougent.
Les idées surgissent de ses paroles,
Et son regard est dévorant !
Il est une île sur lui seul close.
(Description extraite du Manuel de Muad'Dib, par la Princesse Irulan)
[...]
Le mysticisme apparaît facilement lorsque chaque seconde de vie est gagnée en luttant. [...] Avec une telle tradition, la souffrance est acceptée, peut-être comme un châtiment inconscient, mais acceptée tout de même. Et il faut noter que les rites fremen libèrent presque complètement des sentiments de culpabilité. » (Herbert)

23/06/2005

Echec !

« J'ai réussi là où le paranoïaque échoue. » (Freud)

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La mania, le délire, l’irrépressible concaténation signifiante est liée à l’animalité : un animal, me disait une jeune femme qui s'y connaît, ne fait jamais rien au hasard. Or, décrète Lacan, « l’inconscient relève du logique pur». Que ce dernier définisse le réel comme l’impossible, revient à poser, dans l’absolu, la névrose comme état indépassable. D’où : la « voie spinoziste » s'avère pour lui impraticable, ce qu'il a d'ailleurs déclaré lui-même.

Reconnaître l’instance lacanienne de l’Autre, c’est, paradoxalement, méconnaître l’instance du symbolique. Poser l’Autre en tant qu’horizon (la voie spinoziste étant fermée) c’est faire de la castration un indépassable, un transcendant. Mais l’instance de l’Autre n’est qu’une projection de l’imaginaire sur le symbolique. Ceci nous amène donc à poser que le Moi ne provient que du Surmoi (en tant qu’effet d’un certain type de Socius). Certes, "quelque chose", dans le symbolique, doit structurer le Ça ; mais le Surmoi le pétrifie c’est-à-dire produit du Moi. Il est donc nécessaire qu’advienne, pour résoudre ce problème, une autre organisation de Socius. En effet, la castration, liée à la croyance imaginaire à l’Autre (incastrable), provoque la séparation d'avec les zones les plus hautes des intensités.

Car le savoir du psychanalyste est un savoir de pathologiste, pas d'éthicien. Une éthique de la psychanalyse ? Peut-être. Mais pas une éthique véritable et universelle comme science expérimentale. En ce sens Lacan est bien médecin(-psychiatre) même s’il ne « guérit » pas vraiment (ce serait la voie spinoziste) mais étudie, par pulsion scopique, les pathologies. Perversion. En effet, la psychanalyse est elle-même une pathologie (on le sait depuis Karl Kraus) : c’est la pathologie des pathologies. Et c'est en ceci qu’il est intéressant de l’étudier pour en tirer une physiologie. Car il existe de nombreux avantages à connaître le positif d’une structure, telle que l’obsessionnalité ou l’hystérie par exemple. On peut les utiliser, mais il est nécessaire de changer de « masque », de n’y pas rester confiné.

Oui, et au contraire, l’inconscient peut s’interpréter comme la distance, l’espace, entre le lieu (tout ceci implique une tout autre topologie que la rustre de Lacan) du S (point de convergence, pétrification mortuaire) et le « point » du faisceau de conscience. Folie que d’être trop proche, trop longtemps, du lieu du S. Idiotie, bêtise que d’en être trop éloigné.

 

 

22/06/2005

Thespis (souvenir de thèse)

« Aussi paradoxal que cela puisse paraître, il y a un chemin à parcourir et il faut le parcourir, mais il n'y a pas de voyageur. Des actes sont accomplis, mais il n'y a pas d'acteur. » (Sattipathana-Sutta, XLII, 16)

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Ecoutons Sophie Kowalevsky à propos des mathématiques :
« Il n'y a pas de paroles pour rendre la douceur de sentir qu'il existe tout un monde d'où le Moi est complètement absent. »

21/06/2005

L'effet du néant

« L'abstenir pour jouir, c'est l'épicurisme de la raison. » (Rousseau)

20/06/2005

Fondations

A l'âme errante qui se reconnaîtra.


« 473. Où l'on doit construire sa maison.

[...] Douceur puissante comme celle d'un père : - là où cette sensation s'empare de toi, fonde ta maison, que ce soit dans le tumulte ou le silence. Ubi pater sum, ibi patria. »

(Nietzsche, Aurore)

18/06/2005

Flux de lambda-calcul

 

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1932. Alonzo Church invente le lambda-calcul. Son but est d'éviter le massif de la classique théorie des ensembles pour parvenir à fonder les mathématiques. L'échec est patent. Basé sur le concept de fonction, le lambda-calcul s'avère posséder une expressivité nettement plus réduite que celle de l'ensemblisme. Il autorise trois opérations syntaxiques fondamentales qui sont isomorphes aux instructions ayant cours en informatique : adresse des instructions, adresse des données et exécution. En fait, la puissance du lambda-calcul est régionale, et de même ampleur que celle des machines de Turing. Elle est adaptée aux questions de calculabilité. Que Krivine, récemment, ait pu penser que le lambda-calcul soit apte à rendre compte des processus mentaux (intégration des données, processus en cascade, etc.), ne démontre que l'identification abusive entre pensée et calcul. Encore, donc, métonymie et métaphore. Les lacaniens y verront ce qu'il faut y voir. Quoi qu'il en soit, en l'absence de machines pensantes réelles fondées sur le lambda-calcul ou sur quelque autre langage de ce type, il est bien clair que ce rêve leibnizien n'est pas encore réalisé. Mais, étho-onto-logiquement parlant, si ce songe génère amitiés et bons vins, alors que, joyeusement, il perdure.

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Je vous enjoins de ne pas manquer les débuts du séminaire virtuel de Béotien consacré à la lecture de Différence et répétition et de l'Être et l'événement.

16/06/2005

Synecdoque

Nabokov, La défense Loujine :

« De même que, dans une partie réelle, il arrive qu’une "étude" composée par un inventeur de problèmes se reproduise confusément sur l’échiquier, de même, dans son existence actuelle, se dessinait la répétition d’un schéma bien connu de lui. Et, la première joie passée – la joie d’avoir constaté le fait même de la répétition – Loujine, dès qu’il se mit à vérifier soigneusement sa découverte, eut un frisson. Avec une vague admiration et une vague terreur, il examinait la façon effrayante, souple et raffinée, dont s’étaient enchaînées, depuis quelques temps, un coup suivant l’autre, les images de son enfance (la maison de campagne, et la ville, et l’école, et sa tante de Pétersbourg), mais il ne comprenait pas encore ce que cette répétition avait de terrifiant pour son âme. »

Plus loin, et en guise de conclusion :

« […] au moment même où Loujine desserra les doigts, au moment même où l’air glacial s’engouffra impétueusement dans sa bouche, il comprit quelle éternité s’ouvrait devant lui, accueillante, inexorable. »

14/06/2005

Prise d'éternité

« Car les philosophes, ce sont des êtres qui sont passés par une mort, qui en sont nés, et qui vont vers une autre mort, la même peut être. » (Deleuze)

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« L'éternité, c'est long. Surtout vers la fin. » (Kafka)
 
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Naître c'est se produire non comme mortel mais comme déjà mort. La vie, en effet, est "épiphanie de la mort". Nul nihilisme en ceci, tout au contraire. De quoi s'agit-il en fait ? Se savoir mortel est insuffisant. Ce savoir n'engendre que l'extrême angoisse de l'hypochondriaque : la vie comme agonie, comme ce qui ne cesse de se retirer. Au contraire, et à la manière stoïcienne, il s'agit de comprendre que la mort n'est rien pour moi puisque lorsqu'elle paraît je ne suis pas. En ce sens, naître c'est être déjà mort, donc vivre c'est être immortel. Renversons la première représentation. La vie n'est pas un fleuve qui s'écoule vers l'océan noir de la mort. La vie éternelle, ici et maintenant, est un cercle dont le centre est le trou noir de la mort. C'est elle qui totalise la vie, en fait un tout cohérent. Car chaque instant est en relation avec tout autre en un rapport non causal, mais bien plutôt de type musical, c'est-à-dire en relation de résonance. Chaque moment est à la fois absolument différent mais étrangement familier, oui, le même, mais selon une sorte de changement de point de vue. Arrivera donc à vivre non celui qui se sait mortel mais celui qui se sait mort, donc absolument éternel et présent. La vie devient une variation mélodique sur un clavier intensif dont le nombre de notes est immense quoique fini. L'instant de la mort, ou plutôt le dernier instant de la vie, est absolument quelconque, c'est-à-dire échangeable avec tout autre. Ta mort a lieu à chaque instant. Elle a donc déjà eu lieu. Nous ne dirons pas que la vie est ce milieu entre deux néants. Ceux-ci ne diffèrent en rien : c'est le même. Ceci d'ailleurs, la diplopie, qui est impure décorrelation, le manque. Oui, ton extrême passé se confond avec ton extrême avenir. Tous deux ne sont rien. Il est donc tout aussi absurde de poser cet unique néant dans l'avenir que dans le passé. Mais le poser dans l'avenir c'est plonger vers le rien, vers l'angoisse. C'est être insensé. Au contraire, le poser dans le passé, c'est ne cesser de se distinguer de ce néant. Sénèque est à écouter attentivement : quicquid aetatis retro est, mors tenet . A chaque instant, la vie se doit de se produire comme éternelle. Ne pas comprendre ceci est ce qui sépare de la vie vécue, de la grande santé effectivement dissipée. Oui, la vie doit brûler comme une flamme : in girum imus nocte et consumimur igni.

13/06/2005

Canard de croix

L'instant étant souverain, il requiert, repoussant à demain l'aperçu d'éternité, une station préalable. En effet, pour, à certains, ouvrir les yeux, parfois d'étranges biais sont nécessaires.


« Brian... the babe they
called Brian
Grew... grew, grew and grew,
Grew up to be,
Grew up to be,
A boy called Brian

A boy called Brian.

He had arms and legs and hands
and feet
This boy whose name was Brian
And he grew, grew, grew and grew
Grew up to be
Yes he grew up to be
A teenager called Brian
A teenager called Brian.

And his face became spotty
Yes his face became spotty
And his voice dropped down low
And things started to grow
On young Brian and so
He was certainly no
No girl named Brian
Not a girl named Brian.

And he started to shave
And have one off the wrist
And want to see girls
And go out and get pissed
A man called Brian.
This man called Brian. »

(Monty Python)

12/06/2005

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« L'image virtuelle (souvenir pur) n'est pas un état psychologique ou une conscience : elle existe hors de la conscience, dans le temps, et nous ne devrions pas avoir plus de peine à admettre l'insistance virtuelle des souvenirs purs dans le temps que l'existence actuelle d'objets non perçus dans l'espace. » (Deleuze)

11/06/2005

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« Les cavales qui m'emportent, m'ont entraîné
Aussi loin que mon coeur en formait le désir,
Quand, en me conduisant, elles m'ont dirigé
Sur la voie renommée de la Divinité,
Qui, de par les cités, porte l'homme qui sait.
J'en ai suivi le cours ; sur elles m'ont porté,
Attelés à mon char, les sagaces coursiers.
Des jeunes filles nous indiquaient le chemin.
L'essieu brûlant des roues grinçait dans les moyeux,
Jetant des cris de flûte. (Car, de chaque côté,
Les deux cercles des roues rapidement tournaient),
Cependant que déjà les filles du Soleil,
Qui avaient délaissé les palais de la Nuit,
Couraient vers la lumière en me faisant cortège,
Ecartant de la main les voiles qui masquaient l'éclat de leur visage. »

(Parménide, Poème)

10/06/2005

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« Car celui qui cherche seul son chemin peut facilement s’égarer, et même tomber dans la folie, car le chemin du mystique est pavé et bordé de dangers. Il longe les abîmes de la conscience et a besoin d’un pas mesuré et sûr. » (Scholem)

O

« A cette hauteur de pensée où je m'efforce d'atteindre, il est clair que les notions de temps et d'espace n'existent plus. L'histoire toute entière devient synoptique et simultanée [...] La durée est une illusion consécutive à l'infirmité de la nature humaine déchue.» (Chesterton)

09/06/2005

Guerre

« La plupart de ce qui est juste selon la loi est en guerre avec la nature » (Antiphon)

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« Les êtres simplement organiques ont droit à notre respect en tant que créatures : l'homme ne peut y prétendre qu'en qualité de créateur, c'est-à-dire à la condition de déterminer lui-même ses propres modifications. Il ne doit pas seulement, comme les autres créatures sensibles, réfléchir les rayons d'une intelligence étrangère, fût-ce même l'intelligence divine : l'homme doit, comme un soleil, briller de sa propre lumière. » (Schiller)

08/06/2005

I

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Mandragore

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Hache

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Anaximandrake

Le dormeur s'est réveillé. Oui, il a plu sur Arrakis. Le masque d'or a achevé son rôle. Il peut maintenant être déposé au milieu des hommes libres. En effet, son auteur a pris place parmi eux.



Tu ne vaincras que par la liaison des signes, c'est-à-dire par les symboles que tu auras su créer.

06/06/2005

Soi et non-Soi

« D'intenses codages sont raccordés et parfois de sévères mathématiques requises puisque, et en effet, le prix de la victoire sur l'ombre d'un capitaine assoupi mais sempiternel, contre les boulets de cet hippocampe donc, s'avère éternité et absence de chaînes. Toutefois, à l'intention, et pour cause, des esprits chagrins qui la redoutent, rappelons qu'à l'auto-appartenance qui est liberté substantielle, à l'universel donc, nul n'est tenu. » (Apnée, note du 31 mai 2005)

*


Toute philosophie de l'Un est une philosophie ancillaire. Pourquoi ? Parce que pour être en mesure de réciproquer l'Être à l'Un, elle ne peut qu'en différer, mais comme dérivée. Posons un préalable : Spinoza, selon la vulgate, est un philosophe de l'Un-Tout. On rétorquera pourtant que c'est vers l'épicurisme et l'atomisme que tend son système. Car c'est bien plutôt le néo-platonisme qui est philosophie de l'Un-Tout ; c'est la doctrine de l'émanation qui le caractérise en propre. Le Bien et le Mal y sont des principes autophages : l'Absolu s'y dévore lui-même. Psychose et transcendance. Tout différemment, le spinozisme est pure immanence. Le bon et le mauvais ne s'y disent que relativement, mais se distinguent absolument. Voici la différence : la joie n'a pas besoin de la tristesse. La joie comme augmentation de puissance se suffit à elle-même, tandis que la tristesse est servile, liée au manque, c'est-à-dire angoisse. Ainsi Spinoza retire-t-il avec une absolue souveraineté Dieu aux théologiens et à leur engeance, et en fait la pure multiplicité qui n'est multiple que de soi. Son oeuvre, et en particulier les polémiques scolies de l'Ethique, le montre clairement.

Non une bipolarité cannibale mais un seul axe : la joie aristocratique comme augmentation de puissance. Cronos émasculé. Qu'est-ce donc que le pouvoir ? Il n'est que le plus bas degré de la puissance, il est la séparation de la puissance d'avec elle-même, séparation d'avec soi et projection de cette séparation. Donc : l'Un est aliénation pure. Ainsi est-il cette instance qui permet aux autres de se relier en un tout. Il y a donc des uns. Ce qui se dit aussi : il n'y a un et autre que si Un occupe la fonction de l'Autre, c'est-à-dire l'Un en tant qu'aliéné. Or, ladite fonction de l'Autre, s'il s'agit de joie, devient celle de la négation. Point de dialectique. La négation de la négation ne donne pas l'identité. C'est l'identité qui se nie en niant. L'être n'est pas devenir, c'est le devenir qui crée l'être. Leur confusion ? C'est l'Ego. Le non-Soi est le lieu de la transcendance aliénée en perpétuelle négation mais, donc, et par suite, de soi-même, c'est-à-dire de son Moi qui est illusion et sa seule substance. Car l'Un est bien une différence pure quelconque, mais celle-ci est sans relation, et conséquemment, sans Soi. Image auto-suffisante. Or l'image, irrémédiablement, est trouée. C'est donc l'épiphanie du processus pervers à l'état pur : l'image identifiée à l'être, la terrible synecdoque. Non-séparation, dévoration, la mort fantasmatiquement niée, avalée. L'immortalité n'est promise aux pervers qu'en échange de leur aliénation absolue. Mais qui la nécessite ? En effet, tout autre est la joie, l'éternité hic et nunc, c'est-à-dire le pur Soi qui advient à la relation de pures différences. Mais, en l'occurrence, sachons nous taire, et laisser aux écrivains qui savent en parler avec grâce, la parole.

Mais, à ce qui ne vit que par l'inquisition et la question, il n'y a qu'une seule réponse à faire : "Annule-toi". En effet, cette instance a en réalité pour structure fondamentale un "donc ?" central, question secrète qui est comme le lieu même de la déliaison. Son repérage nécessite un art subtil et dangereux de l'expérimentation. Un art, à vrai dire, intuitif et sophistique. Oui, une maïeutique. Et, là encore, au-delà des fières figures de Lacan et de Socrate, c'est le brillantissime Hippias le maître. Car derrière ce "donc ?" muet comme être du problème, il y a un "qui ?" qu'il s'agissait de mettre au jour. Alors, mais alors seulement, il s'agit, pour les philosophies du multiple et du concept, d'opérer des jonctions logiques (connexions et déconnexions), c'est-à-dire, au sein de l'immanence conquise, de créer des liaisons signifiantes dans des systèmes de relations extérieures à leurs termes. Voilà comment la logique de l'éthique de l'être, en tant que mathématique des intensités, qui est logique de l'auto-appartenance, l'étho-onto-logique donc, peut devenir une pragmatique réelle, c'est-à-dire une philosophie constructiviste entre individus libres. Car, et c'est son honneur, quant à lui, « l'homme libre n'agit jamais par fourberie, mais toujours de bonne foi. » (Spinoza)

 

 

 

02/06/2005

Vive Ubu Démocrate de Marché !

« Pourquoi était-il toujours plus ou moins, ici ? Un miroir lui aurait fait plaisir, pour s'y poser cette question. Mais il n'y avait pas de miroir. Rien que la pierre. » (Lowry)

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« Le secret des choses, c'est qu'il n'y a pas de secret. Le message de fond n'est qu'un bruit, et nul ne me fait signe, et il n'y a pas de signal. [...] Qu'il n'y ait rien à lire, au bout de toute lecture, qui le supportera ? » (Serres)

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« The snow on your eyelids that curtsy with age
Is freezing the stares on tyranny's wings.
The bitter is hard and the warmth of your skin
Is diseased with familiar caresses.

Withdrawing from splendor and royal decay
Among all the triumphs and jaded awards
The angry and blazing circus of sun
Blasphemes as the crown prince arises.

You cannot beget all the sins that you owe
To the people of paradise magic
Pretend to answer passion and form
With foreign rationalizations.

Primroses are the jewels that lurk
Among masks of pleasure that flicker with doubt
Embraces of fame that's simultaneously fear
To advance and demand to be recognized.

The river shall flow through hollow green faces
Of caricature's resentment etched out of the tongues.
Both reluctant princess asleep before birth
The classical sensitive failures.

The worshipping wicked cling to the dark of your heart
Lying there and wait with your angels
Moan and ravish from dawn to dusk
The avaricious young lovers. »

(Nico, Winter song)