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23/02/2005

Anti-scepticisme

« Si d’aventure, après cela quelque Sceptique restait encore dans le doute, tant au sujet de la première vérité elle-même que de toutes celles que nous déduirons selon la norme de la première, ou bien celui-là, assurément parlera contre la conscience, ou bien alors nous avouerons qu’il y a des hommes dont l’âme est, également, profondément aveugle, que ce soit de naissance ou bien à cause des préjugés, c’est-à-dire par quelque rencontre extérieure. Car, d’une part, ils ne se sentent pas eux-mêmes : s’ils affirment quelque chose, ou en doutent, ils ne savent pas qu’ils doutent, ou qu’ils affirment : ils disent ne rien savoir ; et cela même, qu’ils ne savent rien, ils disent l’ignorer ; et d’autre part, ils ne le disent pas de manière absolue : car ils ont peur d’avouer qu’ils existent, alors même qu’ils ne savent rien ; si bien que pour finir ils sont condamnés à se taire, de crainte d’aller faire quelque supposition qui ait une odeur de vérité.

Enfin, avec ceux-là il ne faut pas parler de sciences (car pour nous ce qui est de l’usage de la vie et de la société, la nécessité les a contraints à supposer qu’ils sont, à rechercher ce qui leur est utile, et à faire sous la foi du serment quantité d’affirmations et de négations). Car, si on leur prouve quelque chose, ils ne savent pas si l’argumentation est probante ou déficiente. S’ils nient, concèdent, ou objectent, ils ne savent pas qu’ils nient, concèdent ou objectent ; et par suite, il les faut tenir pour des automates tout à fait dépourvus d’esprit. »

Spinoza, Tractatus de Intellectus Emendatione, § 47 et § 48 (tr. Pautrat)



Peut-être est-il loisible de déceler dans ce texte une attaque masquée contre le cartésianisme et son doute méthodique. Alors, une gigantomachie des méthodes ?

Non. Descartes est un faux sceptique ; son doute n'est préalable que pour être, définitivement et en substance, éradiqué. Sa propédeutique a en fait pour vocation de mettre en scène la transcendance divine et non, comme on le répète absurdement, le Cogito. Celui-ci ne se soutient en effet que de la présence de l'idée incompréhensible d'infini en son sein.

En réalité, c'est à un hommage à Descartes auquel Spinoza se livre ici. Comparant les misologues sceptiques à des « automates tout à fait dépourvus d’esprit », il les subsume sous le concept cartésien d'animal.

A l'inverse de l'animal toutefois, c'est à l'infini que le sceptique régresse. A rebours, il s'agit d'intuitionner que toute assertion n'est pas fausse. Sceptique est une âme morte dans la fosse amère de son esprit.

 

 

 

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