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20/09/2005

Requisit

« La puissance du langage ne va pas à instituer le "il y a" du "il y a". Elle se borne à poser qu'il y a du distinguable dans le "il y a". Où l'on pointe les principes, différenciés par Lacan, du réel (il y a) et du symbolique (il y a du distinguable). » (Badiou)

*

« Elle a le souvenir dans ses yeux de cristal.
Elle a mon avenir dans ses mains de métal.
Elle descend sur le monde comme un halo de glace. »

(Houellebecq)

 

 

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Tout l’intérêt de la rationalisation relève non pas de la domestication de la vie mais de son expression totale. C’est donc une rationalité qui diffère grandement de celle qui est en œuvre dans la morale. Ce qu'on entend par éthique, au contraire, concerne l’organisation du désir à partir de principes immanents. La philosophie rationnelle « ne vaut pas une heure de peine » si elle ne débouche pas sur une praxis et une libération du désir. Facere docet philosophia, non dicere. En effet, la passion est « possession » : les déterminismes externes provoquent la déviation de sa propre nécessité interne, en la défigurant, la masquant. L’énergie déployée se met au service desdits déterminismes ; l’expression de l’essence singulière en est empêchée. C’est un phénomène de parasitisme, de parasitage inconscient. Ce qu’on exprime comme étant sien ne l’est pas et manifeste au contraire la teneur de sa dépendance et de sa servitude. Veut-on vraiment ce qu’on veut et ne veut-on pas ce qu’on ne veut pas ? Comme toujours, il convient de distinguer. Pour parler bref, la volonté, ça n’existe pas ; du moins en tant que faculté distincte de son actualisation. Ce qu’on veut est identique à ce qu’on fait ; l’on ne fait pas ce que l’on ne veut pas, et si l’on croit faire ce qu’on ne veut pas, c’est qu’on le veut, obscurément. Mais ce qu’on veut, ce n’est pas forcément son désir, sa nécessité interne. Rien n’empêche que des désirs autres captent le sien et se manifestent pourtant comme « siens ». Ceci n’est surprenant que si l’on croit à l’ego. De même, rien n'empêche que deux essences s'entr'expriment et forment un individu supérieur, de type n+1. Ce qui se dit aussi : une relation est autonome et ne peut avoir lieu qu'au sein de l'immanence. Sinon elle dégènère, le symbolique étant forclos, en rapport de domination, et donc de transcendance, par définition irrationnelle.

 

Tout l’enjeu, sous les vouloirs à demi conscients, mal identifiés, est de parvenir à déterminer son désir comme pur. Pureté, non pas au sens moral. Car, par exemple, il est érotique même s’il ne l’est pas exclusivement, c’est-à-dire qu’il vaudrait mieux dire que c’est la dimension érotique qui est désirante. Donc le désir comporte comme dimension l’érotique mais ne s’y réduit pas, au contraire il lui donne sa puissance. Il ne faut pas confondre le désir et les désirs qui sont comme distraction par rapport au désir pur, sollicitations extérieures qui le saisissent comme latéral et dispersé, non nécessaire. S’il y a des désirs, comme papillonnants, c’est qu’il n’y a pas le désir, c'est-à-dire un désir actualisé. Oui, c’est la multiplicité contradictoire même des désirs qui doit alerter. Toutefois, le désir comme pur, comme non qualifié, n’est pas ivresse libertaire, qui n'est que, comme le rappelle Hegel, furie de la destruction. La liberté de type libertaire défie les conventions et transgresse les limites par provocation : par cet acte même elle les confirme, les ré-institue. Cette liberté a besoin de la loi. En s’opposant elle la confirme comme telle, elle renforce ce à quoi elle s’oppose. Le « pervers », en fait, veut jouir, par la loi, de la loi. Il en est donc d’autant plus esclave. Oui, ce n’est que la reconnaissance de la loi comme loi (reconnaissance dont la transgression est la caricature) qui la fait loi. La loi interdit en posant que ce qui interdit est désiré alors qu’au contraire, c'est uniquement parce que l'interdit est interdit qu'il est désiré. Le désir est leurré. C’est un piège pervers, l’essence même de toute loi. Corollaire : l’opposition (frontale par essence) n’est qu’un aspect de la différence, l’aspect synecdotique, celui qui se prend pour le tout. Donc, il y a de la loi. Mais elle relève du réel, non du symbolique. Enfin, disons que ce constat ne s'impose que si l'on désire penser par soi et réaliser sa nécessité interne, c'est-à-dire actualiser intégralement sa puissance d'agir, donc son désir.

 

 

 

Commentaires

Tant qu'il regarde la loi, le désir sidère. Vouloir transgresser ce n'est pas franchir le mur c'est foncer dedans. Le désir libère quand il trouve le chemin de la porte ouverte.

Écrit par : Alina | 20/09/2005

Tout cela est fort beau. Mais où est la queue ?

Écrit par : Un lecteur | 20/09/2005

Oh, toujours au même endroit, on la trouve les yeux fermés !

Écrit par : Alina | 20/09/2005

A lire, donc, les yeux fermés. (Tout jour n'est pas d'épiphanie)

Écrit par : Un lecteur | 21/09/2005

"Chaque jour qui vient n'est pas un jour qui commence"
Blanchot

Écrit par : Simone | 21/09/2005

Chaque jour vient d'une nuit qui finit.

Écrit par : Alina | 21/09/2005

Mais l'autre nuit , celle qui tient les jours en otage . L'autre nuit , qui glace les sexes Serait-il possible Alina que vraiment vous en triomphiez ? Chapeau !

Écrit par : Simone | 21/09/2005

Il n'y a que la différence qui se répète.
A chaque instant, la vie se doit de se produire comme éternelle. Ne pas comprendre ceci est ce qui sépare de la vie vécue, de la grande santé effectivement dissipée.

Écrit par : Anaximandrake | 21/09/2005

La grande santé ne se dissipe pas mais subit l'ébranlement par la nuit qui gagne . Paradoxalement elle est la plus vulnérable .

Écrit par : Simone | 21/09/2005

La nuit ne gagnera pas.

Écrit par : Alina | 21/09/2005

"J'entends la musique du ressentiment dans votre message" (Simone)
Ne l'entendez-vous pas dans le vôtre, Simone ?

Il est impossible que la nuit gagne. En effet, le nihilisme est "vaincu par lui-même".

Écrit par : Anaximandrake | 22/09/2005

La dernière chose que nous vaincrons, c'est la mort.

Écrit par : Alina | 22/09/2005

"L'absence de ressentiment,* l'absence de préjugé sur le ressentiment *qui sait à quel point finalement je n'en suis pas redevable à ma longe maladie! Le problème n'est pas vraiment simple: il faut l'avoir vécu à partir de la force et à partir de la faiblesse. "

Écrit par : Simone | 22/09/2005

(Nietzsche : ecce homo "pourquoi je suis si sage chap 6 " )

Écrit par : Simone | 22/09/2005

La mort est déjà vaincue.
L'instant de la mort, ou plutôt le dernier instant de la vie, est absolument quelconque, c'est-à-dire échangeable avec tout autre. Ta mort a lieu à chaque instant. Elle a donc déjà eu lieu. Nous ne dirons pas que la vie est ce milieu entre deux néants. Ceux-ci ne diffèrent en rien : c'est le même. Ceci d'ailleurs, la diplopie, qui est impure décorrelation, le manque. Oui, ton extrême passé se confond avec ton extrême avenir. Tous deux ne sont rien. Il est donc tout aussi absurde de poser cet unique néant dans l'avenir que dans le passé. Mais le poser dans l'avenir c'est plonger vers le rien, vers l'angoisse. C'est être insensé. Au contraire, le poser dans le passé, c'est ne cesser de se distinguer de ce néant. Sénèque est à écouter attentivement : quicquid aetatis retro est, mors tenet .

Écrit par : Anaximandrake | 22/09/2005

Les commentaires sont fermés.