09/08/2010
Argumentum ad baculum
« A quoi bon être Pascal, est-on même encore "Pascal", quand on allègue et qu'on énonce le pari ? Qu'est devenu l'Equilibre des liqueurs ? » (Valéry)
« De Voltaire à Valéry, une tradition laïque française a regretté qu'un aussi grand génie que Pascal ait en somme perdu son temps et ses forces à vouloir sauver le galimatias chrétien. Que ne s'est-il voué aux mathématiques, et à ces foudroyantes considérations sur les misères de l'imagination, où il excellait ? Peu suspect de zèle chrétien, je n'ai jamais goûté ces nostalgies intéressées d'un Pascal savant et moraliste. Je vois trop qu'au-delà du christianisme, ce qui est visé est le dispositif militant de la vérité, l'assurance que c'est de l'intervention interprétante qu'elle se soutient, et de l'événement qu'elle s'origine, la volonté d'en tendre la dialectique, et de proposer aux hommes de consacrer ce qu'ils ont de meilleur à l'essentiel. Ce que j'admire plus que tout en Pascal, c'est au contraire l'effort, dans des circonstances difficiles, d'aller à contre-courant, non au sens réactif du terme, mais pour inventer les formes modernes d'une ancienne conviction, plutôt que de suivre le train du monde, et d'adopter le scepticisme portatif que toutes les époques de transition ressuscitent à l'usage des âmes trop faibles pour tenir qu'aucune vitesse historique n'est incompatible avec la tranquille volonté de changer le monde et d'en universaliser la forme. » (Badiou)
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