Le miroir souverain

la philosophie est ce dont les servantes se moqueront toujours, disait Thalès, tombé alors qu'il scrutait le ciel en marchant...

La tâche la plus paradoxale de la philosophie est de lutter contre la bêtise en reconnaissant l'idiotie du réel...

Écrit par : nicolas | 22/06/2006

A l'inverse du profane qui se raillera du système philosophique auquel il n'aura attaché son attention que durant ses instants de veille intellectuelle, c'est-à-dire durant de prodigieuses secondes tout au plus, le jeune philosophe sentira son pouvoir diminuer. Le discours ne persuade que ceux qui sont déjà convaincus, aucune parole ne sera plaisante si l'oreille ne s'y prête pas avec une délectation qui précède la lecture. La servilité du profane éclatera aux yeux du philosophe, mais en rien il lui sera légitime de montrer que la raison bien menée est préférable à cette servilité. Ce serait pur prosélytisme. Le philosophe sachant en quoi consiste une vie philosophique sait qu'il prend le risque de n'être pas entendu et de passer pour le fou des fous. Ce philosophe là ne conditionne pas son activité à la reconnaissance, celle-ci ne lui est d'aucune utilité quant à ce qu'il désire. La tentation d'un jeune esprit entrant en philosophie est de croire manifestes ses nouvelles étapes de pensée, or face à l'aveuglement des autres qui pourrait être objet de scandale, l'impératif de philosopher ne se laisse pas formuler par un discours. Le philosophe ne lutte pas contre la bêtise, la sienne est déjà un bien trop grand ennemi. La haine contre la philosophie est tout aussi suspecte que son aveugle soumission.

Écrit par : Fredo. | 22/06/2006

Cioran est un styliste dont il faut "sentir" les propos avant que les juger. Ici il égratigne la vanité intellectuelle. Il existe bien sûr de multiples raisons à la misologie. Platon par ex. en donne une au début du Phèdre : il la rattache à une forme de misanthropie. Mais là n'est pas l'important. Au sens strict, on peut certes définir la philosophie comme l'étude des systèmes de pensée. Mais à mon avis, la réduire aux constructions verbales de torturés du bulbe rachidien (surtout après leur thèse), c'est là ressortir le cliché de l'intello dans sa bulle. Rappelons au passage que l'image de Thalès moqué par sa servante parce qu'il contemplait à la sur face de l'eau les étoiles n'est pas innocente. Il faut rappeler que l'astronomie est une science phare à cette époque. Les étoiles pour Platon symbolisent par leur orbe circulaire l'éternité et les études d'alors cherchent à "sauver les phénomènes". Passons sur cette anecdote. Philosopher, c'est exercer une activité critique sur le monde qui nous entoure et être à même de donner à penser. Bien sûr, on peut avec critiquer avec Schopenhauer certains travers universitaires. Cela remet certes bien des choses en place. Pensons à ces étudiants qui emploient des mots sans deviner à quoi ils se rapportent, sans cerner les enjeux. Ainsi on jacte sur Kant mais on oublie bien vite qu'en son siècle il cherche entre autres à répondre à cette séparation entre intelligence et morale (on peut être intelligent et bafouer allègrement la morale). Kant essaye de montrer à quelles conditions la connaissance peut avoir du sens, à savoir pour lui par une double-finalité de la raison (raison pure théorique et raison pure preatique), et qu'elle est signe de notre dignité. Bien sûr cette présentation est schématique. Voilà, c'était juste pour signaler que penser, ça a rapport avec la vie et n'est en rien masturbation intellectuelle (remarque quand on est défaillant de celle physique, ça peut compenser...). Faut-il chercher sous le béret (clin d'oeil au Martin pécheur?) le dialogue entre philosophe et non philosophe ? Encore un tour de passe-passe (lacanien) I presume...

Écrit par : Nihilist Tream | 23/06/2006

Le travers universitaire que Schopenhauer attaque n'est pas le verbiage de l'étudiant récemment instruit du monde merveilleux des néologismes et du jargon propre à certains philosophes. A proprement parler, dans un système universitaire, le travers ne vient jamais de l'étudiant, ce que l'on serait tenter de nommer "travers" serait plutôt une bifurcation que le professeur ne contrôle pas. Le travers réel est celui du professeur, le professeur de philosophie est travers car il enseigne ce dont il est très éloigné ("C'est donc un événement des plus rares, qu'un authentique philosophe ait été en même temps professeur de philosophie"). Jargonner sans connaissance c'est comme apprendre à parler, de nouveaux signes amusent et c'est tout, le danger réside dans le fait que le professeur puisse faire autorité sur des esprits qui discernent peu et sombrent par conséquent dans une "bergerie philosophique" et deviennent des "philosophes domestiqués".
("Parerga et paralipomena", mais vous le saviez.)

Écrit par : Frédo. | 23/06/2006

Que sait de la pensée celui qui n'a pas été un jour contraint à penser et qui en fait d'autant plus l'épreuve qu'il n'a jamais été formé (déformé?) dans son àge tendre, par l' instance universitaire, à la philosophie ?

Écrit par : . | 23/06/2006

les productions de mandrake sentent la fatuité qui s'empare de certains esprits quand ils constatent leur incapacité à saisir le réel

Écrit par : lambda | 23/06/2006

les productions de lamb sentent la fatuité qui s'empare de certains esprits quand ils constatent leur incapacité à saisir le réel et le sens

Écrit par : alpha&omega | 23/06/2006

La liqueur d'Izarra a encore de beaux jours devant elle, sembliez-vous dire ?

Écrit par : Big Brother | 23/06/2006

Jaune ou verte ?

Écrit par : Caledemon | 23/06/2006