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04/05/2008

Intuitu rei

« La raison n’est rien qu’une détermination générale et calme des passions fondée sur une vue distante ou sur la réflexion » (Hume)

 

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Passons donc à la réponse de Quentin Meillassoux à Ray Brassier qui critiquait l'utilisation du concept d’ « intuition intellectuelle » dans Après la finitude. Je précise qu’il ne s’agit toutefois ici que d’un point particulier de l’intervention de Meillassoux lors du colloque Speculative realism de 2007 (transcrit dans l'appendice de Collapse volume III).

Si je mentionne cet usage spécifique du syntagme « intuition intellectuelle », c’est parce que cette notion sépare Kant à la fois de Spinoza et des postkantiens immédiats (Schelling, Hegel, Fichte, Schopenhauer). Ainsi, au-delà de sa position particulière dans l’économie de la démonstration de Meillassoux, son importance gnoséologique et épistémologique est-elle philosophiquement cruciale. La question générale est la suivante : l’accès au « réel » lui-même (et pas simplement au « corrélat ») peut-il être de l’ordre de la connaissance ?

Evidemment, le concept d’intuition intellectuelle a une connotation idéaliste. Pour Kant en effet, l’intuition intellectuelle, contrairement à l’intuition sensible, crée activement son objet. Et seul un intellect divin, sans aucune médiation sensible, aurait ce privilège. Aussi, dans cette perspective, le rapport de la pensée d'un être fini à son objet serait-il seulement synthèse de concept et d’intuition.

Toutefois, pour Meillassoux, « intuition intellectuelle » désigne plutôt l’accès intellectuel à la facticité considérée comme un absolu. C’est pourquoi il en fait le synonyme de l’oxymore suivant : « intuition dianoétique ». L’intuition de la facticité, via la démonstration (dianoia), devient intuition d’une extériorité radicale. La facticité, au lieu d’être signe de finitude et symptôme de notre propre subjectivité limitée, s’avère être en réalité relation avec le Grand Dehors.

Cette intuition intellectuelle, en un sens non kantien, est donc selon Meillassoux un nous révélé par une dianoia, à savoir une intuition révélée par une démonstration (procédure intellectuelle). Chez Laruelle (dont Brassier s'inspire) au contraire, le Réel, puisque posé d'emblée, ne peut résister au corrélationisme.

Que cette intuition intellectuelle en tant qu'intuition dianoétique suffise ou non à remplir le rôle que Meillassoux lui assigne dans Après la finitude (et réponde vraiment aux critiques, corrélationistes ou non) est, bien entendu, une autre question.

 

 

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