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07/04/2005

Théâtre catatonique

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Foucault, Theatrum Philosophicum (Critique n° 282) :

« L’intelligence ne répond pas à la bêtise : elle est la bêtise déjà vaincue, l’art catégoriel d’éviter l’erreur. Le savant est intelligent. Mais c’est la pensée qui fait face à la bêtise, et c’est le philosophe qui la regarde. Longtemps, ils sont en tête à tête, son regard plongé dans ce crâne sans chandelle. C’est sa tête de mort à lui, sa tentation, son désir peut-être, son théâtre catatonique. A la limite, penser serait contempler bien fort, de bien près, et presque jusqu’à s’y perdre, la bêtise ; et la lassitude, l’immobilité, une grande fatigue, un certain mutisme buté, l’inertie forme l’autre face de la pensée - ou plutôt son accompagnement, l’exercice quotidien et ingrat qui la prépare et que soudain elle dissipe. Le philosophe doit avoir assez de mauvaise volonté pour ne pas jouer correctement le jeu de la vérité et de l’erreur : ce mauvais vouloir, qui s’effectue dans le paradoxe, lui permet d’échapper aux catégories. Mais il doit être en outre d’assez "mauvaise humeur" pour demeurer en face de la bêtise, pour la contempler sans geste, jusqu’à la stupéfaction, pour bien s’en approcher et la mimer, pour la laisser lentement monter en soi (c’est peut-être cela qui se traduit poliment : être absorbé dans ses pensées), et attendre, au terme jamais fixé de cette préparation soigneuse, le choc de la différence : la catatonie joue le théâtre de la pensée, une fois que le paradoxe a bouleversé le tableau de la représentation. »

 

 

 

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