Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

17/03/2006

Badiou II

Le deuxième tome de l'Être et l'événement (1988), intitulé Logiques des mondes, vient (enfin) de paraître.

En voici quelques lignes :

« Aujourd'hui, la croyance naturelle se concentre en un seul énoncé que voici :
Il n'y a que des corps et des langages.
Disons que cet énoncé est l'axiome de la conviction contemporaine, et proposons de nommer cette conviction le matérialisme démocratique.
[...]
Cependant, le matérialisme démocratique admet un point d'arrêt global à sa tolérance multiforme. Un langage qui ne reconnaît pas l'universelle égalité juridique et normative des langages ne mérite pas de bénéficier de cette égalité. D'un langage qui prétend normer tous les autres et régir tous les corps, on dira qu'il est dictatorial et totalitaire. C'est alors, non de la tolérance qu'il relève, mais du "devoir d'ingérence", légal, international, militaire s'il le faut : on fera payer aux corps leurs écarts de langage.
[...]
L'histoire d'un monde n'est que la figure temporelle de l'universalité de son exposition. Elle est en dernière instance le dépli de sa surabondance d'être. L'inaccessibilité infinie du support d'être d'un monde donne lieu à l'exposition universelle des relations et donc à la complétude logique de ce monde.
[...]
On me dit parfois que je ne vois dans la philosophie qu'un moyen de rétablir, contre l'apologie contemporaine de l'ordinaire et du futile, les droits de l'héroïsme. Pourquoi pas ? Cependant, l'héroïsme ancien prétend justifier la vie par le sacrifice. Mon voeu est de le faire exister par la joie affirmative que procure universellement le suivi des conséquences. Disons qu'à l'héroïsme épique de qui donne sa vie, succède l'héroïsme mathématique de qui la crée point par point.
[...]
L'animal désabusé dont la marchandise est l'unique repère, nous ne serons livrés à sa forme que si nous y consentons. Mais de ce consentement nous protège l'Idée, arcane du présent pur. » (Badiou)


Commentaires

Badiou a parlé d'un "livre énorme" à son séminaire et d'un "monstre philosophique" dans une interview. Le manque de modestie est une qualité que j'ose de temps en temps apprécier - chez qui sait la justifier (Nietzsche a écrit Ecce Homo APRES avoir écrit le reste de ses oeuvres, PAS AVANT...). Et Nietzsche n'a pas RELIE le monde, il lui a posé le problème de ses problèmes, la question de ses questions. Il y a une (généa)logique de la logique (quand bien même des mondes...).

Écrit par : nicolas | 17/03/2006

"Disons qu'à l'héroïsme épique de qui donne sa vie, succède l'héroïsme mathématique de qui la crée point par point."


"Cher Monsieur, dis-je- Quoique depuis longtemps éloigné,
l'Homme n'est pas entièrement perdu ni totalement changé.
Il peut avoir perdu la grâce, il n'a pas perdu le trône,
et conserve les loques de la seigneurerie que jadis il posséda:
cet Homme, Sous-créateur, au travers duquel la Lumière reflétée est brisée
du blanc unique en maintes nuances et sans fin combinée
en formes vivantes qui passent d'esprit en esprit.
Si toutes les crevasses du monde, nous les avons emplies d' Elfes et de Gobelins,
Si nous avons osé bâtir des Dieux et leurs demeures des ténèbres et de la lumière,
et si nous avons semé la semence des dragons _ c'était notre droit (bien ou mal employé).
Ce droit n'est pas tombé en désuétude:
nous créons toujours selon la loi au sein de laquelles nous sommes créés." (JRR Tolkien)

(sourire)





(sourire)

Écrit par : LKL. | 17/03/2006

une vision bien"evolienne"et "traditionnelle" des axiomes post-moderne...

Écrit par : aspirant | 17/03/2006

"Disons qu'à l'héroïsme épique de qui donne sa vie, succède l'héroïsme mathématique de qui la crée point par point."

et souvent au risque de la perdre dans le vide qui sépare ces points...

Écrit par : kalima | 17/03/2006

Badiou je doute qu'il soit un héros de la pensée, le combat est ailleurs mais je lirais quelques unes de ses feuilles

Pas beaucoup de choses à raconter sauf que je risque d’aller manifester ce qui est rare. La dernière fois c’était à l’occasion de la quinzaine anti-Le Pen en mai 2002. Pourquoi accoler les deux ? Peut-être parce que ceux qui ont manifesté contre Le Pen et par la suite voté contre leur conviction pour Chirac se sentent maintenant plus que trahis, humiliés par cette droite inflexible qui tente de résoudre le chômage des jeunes par un contrat inique alors qu’elle est responsable de l’aggravation de la situation. Je pensais que la fronde anti-CPE allait décliner, je l’ai même écrit et tant mieux si je me suis trompé. Cette fronde est pour moi le signe qu’il existe une résistance dans ce pays et quelques résidus d’humanisme rebelle. Les indicateurs ne trompent pas, la mobilisation risque d’être importante et ma foi, cela n’est pas pour me déplaire car on y voit le signe d’un refus du système actuel, obligeant à repenser la société, ce qui peut se faire à l’échelle d’une Nation, bien plus que pour le TCE. Le CPE n’a pas pour objectif de changer le modèle actuel mais au contraire d’entériner les tendances actuelles de ségrégation sociale. Et de pérenniser la fracture sociale. Autant dire qu’en reprenant les termes d’Yves Montand à propos des communistes, casser la gueule à Chirac est une idée à prendre au sérieux. Proposer un autre concept de société n’est pas qu’une idée, mais une tâche à prendre au sérieux

On pourrait penser que le CPE est le fruit d’un amateurisme émanant d’un énarque et de son Ministre. Oui et non car en vérité, c’est le signe d’une droite qui ne peut piloter la société vers plus de justice sociale, qui n’a aucun projet et se crispe sur un contrat de dupe destiné à faire croire à l’action gouvernementale. Logique de l’entreprise ! Appliquons-là. Un bureau d’étude capable de pondre cette connerie qu’est le CPE serait viré illico pour faute professionnelle. Le CPE, les Français sont pour à condition qu’on l’applique à Dominique de Villepin. Viré et qu’il ne se plaigne pas, Dominique de Villepin sera viré avant les deux ans, en période d’essai, avec un motif légitime ! Ce type est enfermé dans ses obsessions d’action, son dessein historique, une sorte de malade mental inapte à comprendre le pays, comme un certain Hitler d’ailleurs, dixit le physicien Max Plank dans ses mémoires.

De Villepin qui a déclaré selon les recensions de Franz-Olivier Giesbert que « La France a envie qu’on la prenne. Ca la démange dans le bassin. Celui qui l’emportera à la prochaine élection, ce ne sera pas un permanent de la politique mais un chenapan, un saisonnier, un maraudeur ». Drôle de phrase mais qui sonne juste dixit Valérie Pécresse qui connaît bien le personnage. Cette idée de France et de nation en général prise par le pouvoir d’un homme n’évoque-t-elle pas les pensées d’un certain Adolf ?

Pour le reste, on sait bien que l’emploi ne jaillit d’un type de contrat mais d’une conjoncture économique et politique vertueuse. Le CPE ne fera que se substituer à d’autres types de contrats. Le vrai problème, c’est la solvabilité et la concentration des moyens de paiement. Si les gens n’ont pas de quoi payer, alors il n’y a aucune raison que la situation de l’emploi s’améliore. Et le système peut suivre sa course. Dommage que personne ne vienne discuter de cette proposition de monéthique dont je suis l’auteur. C’est une idée assez curieuse et insensée et pourtant elle tient la route il me semble.

Écrit par : Fulcanelli | 17/03/2006

Sarkosy a déclaré en se rasant qu'il n'avait qu'une seule chance pour monter jusqu'au sommet de la "Pyramide"(?) : en 2007 ou jamais...

Écrit par : Danielle | 17/03/2006

Bonjour, Anaximandrake. Un sentiment général su Badiou : n’est-il pas temps de dépasser ce balbutiement frigide du lacanisme : « Il n’y a que des corps et du langage ? ». Dépasser aussi cet esprit d’inventaire, de boutiquier ontologique : « Il n’y a que… ». Voir plutôt Hamlet : « Il y a beaucoup plus de choses etc. ». Toutes les phrases en « n’est que » sont creuses en philosophie : « L'histoire d'un monde n'est que la figure temporelle de l'universalité de son exposition ». Quant à ce qu’une chose peut être en « dernière instance », à part que c'est un tic (ou un TOC) de normalien, on a envie surtout de dire : « épargnez-nous vos derniers mots sur des sujets qui nous sont brûlants ». Quant à « l’héroïsme mathématique », il faudrait demander aux chômeurs, aux érémistes, aux fragilisés de la vie, aux angoissés de la sécheresse, aux damnés de la faim, à ceux qui croupissent dans les geôles des héritiers de Mao et d’autres « timoniers », si ça ne leur redonne pas espoir. La phrase : « L'animal désabusé dont la marchandise est l'unique repère, nous ne serons livrés à sa forme que si nous y consentons » est de la philosophie de café. Sauf peut-être à remarquer qu’il y a « animal ». Mais je crains qu’il ne s’agisse que d’un archaïsme langagier qui reste ici totalement impensé.

Écrit par : sancho | 18/03/2006

Sancho, la proposition "il n'y a que des corps et des langages", en tant qu'axiome de la post-modernité, est justement ce que dépasse Badiou dans son dernier opus. Lisez donc avant que d'opiner et avisez vous de ceci : "desines timere, si sperare desieris" (Sénèque). Ce sont des requisits minimaux de la philosophie.

Cet ouvrage de Badiou est à la fois un grand livre et sa "Grande Logique". Après l'ontologie, thème de 'l'Être et l'événement', 'Logiques des mondes' est donc, conformément à ce que brossé à grands traits à la fin du 'Court traité d'ontologie transitoire', une logique de l'apparaître, une phénoménologie indéductible de l'ontologie.

Écrit par : Anaximandrake | 18/03/2006

OK, je n'ai pas lu Badiou, mais je ne place pas non plus de si grands espoirs dans cette lecture. J'entretiens ma faculté d'espérance avec d'autres aliments. Je ne crois pas que des traités où la phénoménologie est "indéductible" de l'ontologie puissent éclairer sur les problèmes d'aujourd'hui. Dans mon jugement sur Badiou, je me référais surtout aux quelques citations que vous avez reproduites. Vous avez raison. Il faut sans doute le lire. Mais quel triste sort d'avoir à traverser un fleuve d'arguments, si je me retrouve sur la berge de mon départ. Quant aux réquisits minimaux de la philosophie, nous sommes en de nouveaux temps, où ce n'est pas tant l'espérance qui est à l'ordre du jour, que la décision de créer un monde neuf.
Mais comme j'adore le débat, je vais lire Badiou. Et on en reparlera.

Écrit par : sancho | 18/03/2006

J'en suis heureux. Je continue de penser que la philosophie se doit d'être inactuelle, c'est-à-dire intempestive. Quant à l'espérance, elle était, non sans raison, contenue dans la boîte de Pandore.

Écrit par : Anaximandrake | 18/03/2006

la "philosophie" est peut etre le seul contre-pouvoir substanciel en occident pour le "post-post-modernisme"...les piliers de la civilisation ne sont ils pas marbrés de "philosophies-metaphysique"...

Écrit par : aspirant | 18/03/2006

anaximandrake, il est regrettable que vous n'appréhendiez avec aucun recul la philosophie, ce dont atteste à l'évidence votre alternance entre une posture post-adolescente d'acerbe mépris et une tendance post-khâgneuse hachquatraine à lâcher des citations latines à tous les coins de rue. plutôt que de vous enfoncer dans l'ombre de votre propre caricature, je ne peux que vous recommander deux choses, dans l'espoir que vous cessiez - notamment - de ternir la pensée de Badiou et de la rendre moins exalto-risible :
- moins vibrer sur les mots que cerner les idées (éventuellement, faites un site à part sur vos fantasmes),
- en restituer l'intelligence plutôt qu'en tirer prétexte pour faire valoir la prétendue vôtre (éventuellement, faites un site à part sur vos complexes).
bien attentivement,
la fée Probité

Écrit par : Probité | 25/03/2006

« On fabrique de la probité avec toutes sortes de vices, comme on fait du papier blanc avec des guenilles de mille couleurs » - vicieuse fée aussi inattentive que viciée...

Écrit par : Xavier Forneret | 25/03/2006

une citation et un jugement symétrique. merci à votre aigreur (il est rare que l'on vibre sans trembler) pour cette réponse aussi constructive quant à son contenu que humble quant à son utilisation de la culture.

Écrit par : Probité | 25/03/2006

Allez, soyez humble et allez vous instruire ; a priori (pardonnez le latin...), ce serait 'constructif'. Votre esprit chagrin, acrimonieux, sans humour, vivacité ni éclat pourra peut-être ainsi produire un embryon de raisonnement. Car, mon bon, vos sentiments et vos inférences boîteuses et amères n'intéressent que vous.

Écrit par : Anaximandrake | 25/03/2006

Les commentaires sont fermés.